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13/11/2010

Aung San Suu Kyi enfin libre !

(Réédition intégrale d'un post datant 11 mars 2009, faisant suite à un voyage en Birmanie...)

Le voyage est maintenant terminé, mais je tenais à ce que ce dernier article soit consacré à Aung San Suu Kyi, seul référent à nos yeux d'occidentaux, de l'opposition à la junte au pouvoir depuis prés de 50 ans...

Je tenais aussi à livrer mes impressions (liées à la dictature) après deux semaines passées en Birmanie.

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D’abord un petit retour historique : La Birmanie fût annexée au milieu du XIXème siècle par les britanniques (comme de nombreux pays alentours à commencer par l’Inde).

Au cours de la Seconde guerre mondiale, les japonais prirent la relève, déclarant l'indépendance du pays tout en le tenant fermement  sous leur joug...

Le général Aung San (anciennement étudiant contestataire, et père de Suu Kyi), qui était alors ministre de la guerre d’un gouvernement sous tutelle nippone, changea alors son fusil d'épaule et déclara la guerre à l'Empire du soleil. Il dut ensuite bouter hors du pays les anglais qui s'y étaient entre-temps réinstallés ! Il sera le père de la "véritable" indépendance, sans pour autant jamais la connaître : Il fût assassiné par des rivaux en 1947 ! Aung San Suu Kyi n'avait alors que 2 ans...

La jeune démocratie parlementaire survivra moins de 15 ans avant d'être balayée par un premier dictateur dés 1962. C'est depuis ce jour une junte de généraux qui dirigent le pays, le dernier en date étant Than Shwe, 74 ans et plus toutes ses facultés...

Aung San Suu Kyi fera ses études en Inde (ou sa mère est ambassadrice) puis à Londres et Oxford. Elle travaillera également à New-York pour l'ONU en 1969. En 1972, elle se marie à un britannique avec lequel elle a deux enfants...

En 1988, elle retourne vivre en Birmanie, et participe activement à la création de la Ligue Nationale pour la Démocratie (LND). Elle sera arrêtée en 1989 puis laissée en liberté surveillée.

En 1990, sous la pression populaire, des élections sont enfin organisées : le LND obtient 80% des voix. La junte, totalement dépassée, décide alors d'annuler purement et simplement les résultats !

Aung San Suu Kyi, qui a reçu le Prix Nobel de la Paix en 1991, a vécut depuis lors en semi-liberté, en prison, ou en résidence surveillée. La junte n'a eu de cesse de lui faire quitter le pays, ce qu'elle a toujours refusé...  Son mari, gravement malade en 1997, mourra 2 ans plus tard sans avoir jamais eu le droit de revenir en Birmanie !

Les assignations à résidence sont reconduites automatiquement depuis 2003 ; Celle de l'an passé devrait échoir en mai de cette année...

A 63 ans, totalement coupée du monde dans sa maison de Yangon (qu'il n'est pas conseillé d'approcher !), elle continue de représenter aux yeux de la grande majorité des birmans ainsi que de l'opinion internationale, la seule alternative à cette junte archaïque et totalement coupée des aspirations du peuple qu'elle appauvrit année après année...

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Quand on est touriste, on ne voit pas grand chose. D'abord parce que l'on circule généralement autours d'une dizaine de "sites bien définis". Ca ne veut pas dire que les autres régions soient nécessairement interdites, mais le voyageur, devant la richesse de Mandalay ou Bagan, trouve moins de bonnes raisons de se perdre dans les campagnes...

Ces lieux "bien définis" ont l'avantage de voir passer le touriste et profiter ainsi de ses prébendes. Ils sont généralement dotés d'aéroport, d'hôtels de toutes catégories et les infrastructures y semblent convenables, ce qui n'est pas le cas dans les 80% du reste du pays...

Pour le reste, on ne peut avoir qu'une opinion fragmentaire et donc partagée. Les aéroports fonctionnent plutôt bien, mais les routes sont toutes désastreuses. L'électricité est régulièrement coupée plusieurs heures par jour, où que ce soit dans le pays, ! Les écoles semblent bien fonctionner mais il semblerait que les birmans doivent mettre souvent la main à la poche pour l'éducation de leurs enfants, et que le niveau universitaire reste quant à lui difficilement accessible (en plus d'être étroitement surveillé : comme dans toutes les dictatures, le pouvoir a une peur bleue de ses étudiants). Pour ce qui est de la santé, on n'en voit pas grand chose, mais l'incurie générale laisse imaginer le pire...

On ressent souvent la pauvreté, mais rarement la misère. Ce n’est pas comme certains pays d'Afrique, où l'accès à l'eau est un fléau. Ici, le climat l'offre en abondance et un système séculaires de réservoirs permet de la conserver entre deux saisons. Il y a bien sûr aussi les fleuves généreux et les lacs. La sécheresse n'est donc pas de mise non plus...

Ce qui choque le plus en fin de compte, ce sont ces centaines de millions de dollars cooptés par la junte au profit de son unique survie et qui pourraient permettre aux birmans d'avoir un niveau de vie très nettement supérieur. Ce qui choque vraiment, c’est cette armée de 400 000 hommes qui engloutie à elle seule 50% du PNB.

Car de richesses, la Birmanie n’en manque pas : Deux récoltes par an  (la Birmanie reste un pays agraire), du pétrole, du gaz, des bois rares, des pierres précieuses, etc.

(On ne doit malheureusement pas non plus faire l’impasse sur la culture du pavot, l’une des plus grandes sources de revenus du pays).

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Les choses, changent, mais doucement : L’internet se développe un peu et la junte est incapable de « bien » la censurer ; La télévision (et donc l’information) internationale arrivent de plus en plus dans nombres de foyers. Le touriste circule librement (même si il n’a toujours pas le droit de loger chez l’habitant). Les passages aux aéroports et aux douanes sont aussi simples qu’ailleurs dans le monde !

Pour ce qui est du travail forcé, je ne peux bien évidemment apporté aucun élément…

Deux choses enfin m’ont étonné : D’abord je n’ai pas vu un seul militaire de tout mon séjour (à se demander où ils les cachent !!!) Et jamais, mais absolument jamais, de portraits ou de statues d’un quelconque leader (comme à Cuba, en Syrie, en Egypte et j’en passe…)

Aucun culte de la personnalité… La Birmanie n’est pas la Corée du Nord !

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Deux « entités » vivent donc ici, l’une proche de l’autre, mais sans jamais se mélanger : 400000 militaires d’un côté, dirigés par une poignée de généraux, et 50 millions de birmans de l’autre. Les deux craignent vraiment l’autre et se regardent en chiens de faïence. Les militaires ont pour eux les fusils, et donc la force…mais jusqu'à quand ? Ces militaires, qui sont aussi des birmans, peuvent un jour se retourner contre leurs chefs !

De toute façon, si les choses changent, elles se feront sans ingérence directe. D’abord parce que la Birmanie n’est pas une priorité pour le reste du monde et que la Chine s’opposera toujours à un coup de force venu de l’extérieur.

En cas de boycott, se seraient les populations les plus défavorisés qui en paieraient le prix fort…

A l’heure actuelle, la seule solution pour qui veut agir, c’est de soutenir l’opposition en exil…

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